Chaque mois d’octobre, les gens baissent leur garde. Les rues se remplissent de latex et de décolletés. Les femmes s’habillent en « sexy quelque chose ». Les hommes se maquillent.
Pendant une nuit, le désir sort jouer, et personne n’appelle les RH.
L’écrivain et chroniqueur Dan Savage a déjà lancé en plaisantant que Halloween, c’est la Fierté des hétéros. C’est la seule nuit de l’année où les hétéros peuvent faire ce que les personnes queer ont perfectionné : exprimer leur identité à travers le désir, en public, avec joie.
Son clin d’œil cache une part de vérité. Halloween agit comme un laissez-passer culturel pour explorer la sexualité, le genre et la fantaisie, d’une façon qu’on s’autorise rarement. Et on adore.
Liberté du corps
L'Halloween suspend temporairement les règles de pudeur qui façonnent la vie quotidienne, surtout pour les femmes. Cette nuit-là, les codes changent. La lingerie devient un costume acceptable. Les mini robes ne sont plus « trop provocantes ».
Pour bien des femmes, c’est une forme rare de libération. C’est l’une des seules occasions sociales où montrer son corps n’est pas immédiatement interprété comme du désespoir.
Certaines personnes lèvent les yeux au ciel devant les « infirmières sexy » ou les « chats coquins ». Pourtant, l’élan est profondément humain : le besoin d’être vue, admirée, et de ne pas avoir honte d’un corps qu’on cache d’habitude sous des vêtements « appropriés ».
Tout comme les défilés de la Fierté donnent de la visibilité aux personnes queer, Halloween offre aux hétéros un moment de liberté approuvé par la société. Le problème n’est pas que ce soit sexy. C’est que cela ne dure qu’une seule nuit (à moins, bien sûr, qu’on fréquente des soirées kinky, mais ce sera pour une autre fois).
Jouer avec le genre
Il se passe aussi autre chose : les règles de genre se relâchent.
Les hommes se peignent les ongles, portent des talons ou enfilent des bas nylon. Les femmes jouent avec le drag aussi, en se transformant en gentleman dandy ou en rock star androgyne. C’est performatif, mais aussi discrètement radical.
Pour beaucoup d’hommes hétéros, c’est la seule occasion socialement sûre de flirter avec la féminité. Et même quand c’est fait pour rire, l’effet demeure : ce moment où quelqu’un se regarde dans le miroir et se sent sexy dans un costume qui brouille les genres.
Le kink en plublic
Entrez dans n’importe quelle party d’Halloween et vous verrez des accessoires BDSM. Colliers, menottes, latex, harnais, laisse… tout cela déguisé en costume.
L'halloween est une véritable foire du kink. Elle permet aux gens d’endosser des rôles (ange et démon, maître et serviteur, chasseur et proie) qui reflètent de vraies dynamiques de pouvoir. Des couples qui n’ont jamais utilisé de safe word se retrouvent soudain à faire du jeu de rôle en public, sans même savoir qu’ils reproduisent ce que les communautés BDSM pratiquent toute l’année.
Même le masque, au sens propre comme au figuré, a son importance. Les psychologues parlent de l’« effet du masque » : lorsqu’on cache son identité, on agit souvent avec plus d’assurance. C’est ainsi qu’un homme timide peut devenir une femme audacieuse le temps d’une soirée. Ce n’est pas le costume qui compte, c’est la permission. Les drag queens le savent depuis toujours.
Transgression collective
Dans toutes les cultures, il existe une fête qui renverse l’ordre établi. Carnaval, Mardi Gras, Pourim… des moments où les normes sont suspendues. Halloween est la version nord-américaine : un acte de transgression collectif où nous acceptons tou·te·s d’être un peu moins sage, ensemble.
Les personnes qui passent le reste de l’année à se fondre dans la masse ressentent soudain le besoin de se démarquer. Elles flirtent plus ouvertement. Elles posent pour les photos d’inconnu·e·s. Elles dansent autrement. Et parce que tout le monde brise les règles en même temps, personne n’est pointé du doigt.
Ce frisson partagé est érotique en soi. L’exhibitionnisme et le voyeurisme deviennent des activités de groupe. L’énergie du « regarde, mais ne touche pas » rappelle la culture fétichiste, sauf que tout le monde y participe. Même le consentement devient performatif : Je peux toucher tes cornes ?
Alors, pourquoi parler de Fierté hétéro ?
Parce qu’au fond, la Fierté, c’est une question de permission. La permission d’être visible, flamboyant·e, excessif·ve.
Il n’existe pas de meilleur équivalent dans la culture hétéro qu’Halloween. C’est imparfait, bien sûr. Commercialisé, sans aucun doute. Mais sous le polyester et les paillettes, il reste quelque chose de brut et de vrai : le besoin d’exprimer ses désirs sans excuses.
Savage avait peut-être raison, mais il a minimisé la portée. Halloween n’est pas seulement une Fierté hétéro, c’est un cours intensif collectif sur le jeu érotique. La preuve que tout le monde a envie d’expérimenter les costumes, le pouvoir et l’identité.
Et peut-être que le vrai tour de magie, c’est celui-là : ne rangez pas cette énergie en même temps que votre costume. Laissez cette audace, cette curiosité et cette permission déborder un peu sur le reste de l'année.
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